Faire la révolution ensemble

Le supermarché ne sert ni les intérêts des producteurs ni ceux des consommateurs. La coopérative Paysans-Artisans tente de construire un modèle plus juste, plus sain. Et plus humain.

Bertrand Delvaux est l’un des coordinateurs de la coopérative de producteurs et de consommateurs Paysans-Artisans. Interview.

Qu’est-ce qui vous a conduit à créer votre coopérative ?

On partait d’un constat, qui est malheureusement toujours le même : il y a une concentration de la terre et des moyens, avec des fermes de plus en plus grosses. Cela a trois conséquences : la paysannerie et l’artisanat, mis sous pression depuis trop longtemps, meurent petit à petit, la distribution exerce une pression énormissime sur les producteurs et le consommateur est perdu face à un marketing qui met l’accent sur le prix bas et non sur le produit.

C’est ainsi que des paysans et citoyens se sont fédérés autour d’un projet de société concret ayant pour but de réinventer un modèle de production, de commercialisation et de consommation.

Qu’est-ce qui vous a conduit à créer votre coopérative ?

Pouvez-vous expliquer le problème lié à la distribution ?

En Belgique, cinq groupes se partagent 85% de la distribution alimentaire, obligeant les producteurs à se faire tout petits et à casser leurs prix. Le système repose sur trois piliers : la production, la distribution et la consommation. La distribution est le pilier central ; c’est par là qu’on peut soutenir les producteurs et sensibiliser des consommateurs, en faisant se rencontrer autour d’un projet de société des réalités aujourd’hui trop éloignées.

Vous avez donc commencé par regrouper des producteurs et organiser des commandes en ligne de paniers.

Oui. On a commencé avec 25 paniers. Aujourd’hui, on en a près de 600, qui sont distribués via plusieurs magasins de proximité, des points de « r’aliment » tenus par des bénévoles et un service de petit grossiste. On nourrit 3500-4500 familles par semaine, avec 120 producteurs qui livrent la coopérative en direct. Le volume devient significatif.

Vous proposez aussi du non-bio. Pourquoi ?

Nous soutenons fortement le bio mais nous voulons être ouverts sur le monde paysan, sans fermer de portes par principe et en proposant un dialogue. Certains ont besoin d’un peu plus de temps pour franchir le cap. L’accent est mis sur la distribution, mais vous soutenez aussi la production et la consommation ?On embarque les producteurs dans notre projet. Avec humilité et des petits moyens, on cherche comment améliorer leur travail, par exemple en créant la Fabrique Circuit Court à Suarlée, dédié à la transformation (atelier de découpe de viande, bocalerie, légumerie, conserverie, presse de fruits, etc.), qui a vu le jour cette année.

Comment crédal vous a-t-il aidés ?

Nous sommes partenaires depuis le début. Nous avons eu deux crédits-ponts de 200.000 euros pour le financement de la bocalerie et de la légumerie.

Et les consommateurs ?

Les nombreux bénévoles portent le mouvement avec nous. On ne veut pas juste acheter et vendre des produits mais acheter à des producteurs que l’on connaît et vendre à des consommateurs avec qui on peut réfléchir. On essaie d’être en mouvement, de co-construire un nouveau modèle de plus en plus robuste mais qui reste fébrile, face aux géants de la grande distribution. Le tout en faisant la fête et dans la bonne humeur.

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